À propos de Marteau Rouge


Télérama janvier 2008


Revue de Presse Mulhouse 2007


À la guitare, Jean-François Pauvros fore l'espace sonore à coup de déflagrations abyssales. Sur ses machines électroniques Jean-Marc Foussat se démène comme un diable, appuyant ses bidouillages bruitistes de glapissements et autres borborygmes, tandis que le batteur Makoto Sato s'acharne sur ses toms avec un entrain réjouissant.
Complètement improvisée, la musique de Marteau Rouge investit l'instant, le façonne en profondeur dans une tension partagée.


Hugues Le Tanneur (Aden)



Peut-être faut-il savourer ce temps où le groupe, vieux de deux ans, déverse ses flux en des lieux décalés: des caves à répétitions à l’Espace Japon en passant par un théâtre italien introuvable dans le bottin...
… Foncièrement déstabilisants, les élans sonores de Marteau Rouge. Chaos de sons spontanés, graves, profonds et saturés, tirés à l’archet de la guitare de Pauvros, éclats de fin du monde. Jean-Marc Foussat troue l’espace de cris imprévisibles, sons et morceaux de réalité. Dansent les baguettes de Sato, là pour unifier tous ces instants de liberté. Ecoute intense, sculpture du silence. Art du peu, du jeu… Toms frappés, aigus, à la manière des tambours de fête japonais.
Au chant, les flûtes traditionnelles et la trompette veloutée d’Itaru Oki. Un souffle nouveau pour le trio, mené vers des sonorités éthérées d’une grâce imprévue.
Marteau Rouge a été fidèle à ses deux règles : inviter des musiciens (déjà rencontrés : Daunik Lazro...) et offrir au public (des sprats et un très bon vin blanc — sinon Pauvros ne joue pas). Prévu pour Noël, un disque. Mais déjà chaque concert est un cadeau.


S. Haluk (Jazz Magazine)



… Beau triangle ouvert, entre les six cordes cyclorythmiques de Pauvros, le sorcier du son Jean-Marc Foussat et le batteur sculpteur Makoto Sato. Un conduit électrique discontinu et méandreux, plein de courts-jus entre le tonnerre et le silence, entre le dur et l’informe, entre le bruit et les effets…


R. Robert



Jean-François Pauvros donnera le meilleur de lui-même au sein de “Marteau Rouge” avec le maestro Joe McPhee en invité, dans une fiévreuse blowing session sur le fil du rasoir, riche en rebondissements et relances.

Gérard Rouy


Chronique d'un concert de Marteau Rouge :

Quand je suis allé voir Marteau Rouge, j’étais mal ...
J’entre, et puis après m’avoir offert du vin, du poisson et des petits gâteaux au sésame, on m’invite à prendre place.
En face de moi, un trio.
À ma gauche un grand corps, comme une sorte de grand christ pré-gothique, une verticalité sonore : un guitariste puisqu’à mi-corps un objet tient encore, qui évoque une guitare.
À droite un être concave gesticulant, penché sur des pupitres, des consoles, autour desquelles voisinent des rangées de cassettes chacune soigneusement titrées et toute une série de jouets d’enfants. Mais pourtant l’essentiel du jeu de cet acteur là serait quand même la voix, miaulements, cris de souffrance, évocations urbaines ou galactiques qui s’extériorisent en direction du reste de la scène. On n’entendra jamais les véritables sons de tout ce bric à brac puisqu’ils seront systématiquement torturés par des machines électroniques.
Pendant tout ce qui est vécu comme la première partie du spectacle, ces deux êtres s’ingénient à m’interdire absolument d’entendre de la “Musique” : ils s’expriment dans un registre totalement différent, que je ne peux pas encore définir.
Et cette concavité tournée vers le centre buterait inexorablement sur la verticalité évoquée auparavant, si au centre n’officiait un véritable musicien : un musicien faisant dans l’harmonie et la mélodie, un batteur Néo-bop très classique, très musical où je me retrouvais parfaitement.
Lui fait de la musique.
Les autres font des sentiments je dirais...
Si je compte la totalité de la représentation dans le temps, je dois dire qu’il m’a fallu quelque chose comme le tiers de ce temps pour intégrer la convention qui pouvait me permettre d’entrer dans le vif du sujet, dans le propos des trois musiciens.
Il faut l’accepter, on se torture à vouloir l’accepter et finalement on y arrive, soulagé.
Et c’est là que toute la perversité de Marteau Rouge s’exprime parce que, à peine a-t-on accepté la convention que soudain le guitariste, Jean-François Pauvros, casse toute cette construction intérieure que l’on vient de se créer.
Il casse tout ça en produisant simplement quelques notes, des vraies notes, des notes musicales.

Et pendant un bref instant on est complètement déstabilisé, on ne comprend plus rien à ce qui se passe, on est renvoyé brutalement au monde d’avant, celui dont on vient de s’extirper à grand peine, et il faudrait déjà y retourner, oublier tout ce travail que l’on vient de faire sur soi-même, travail quasi analytique, qui nous a coûté et qui en un éclair est réduit à néant.
Le batteur, Makoto Sato, n’est pas surpris pour autant, alors que le bruiteur, Jean-Marc Foussat, semble exulter, mais dès lors, l’essentiel de son travail va être de ruiner à son tour ce caprice musical par des croches pieds sonores, des invectives répétées, et jusqu’à la fin du spectacle, parce que l’on peut vraiment parler de spectacle, il va y avoir comme ça une sorte de zapping permanent, un déhanchement scénique entre des velléités musicales et des “retours à l’ordre”.
L’essentiel de Marteau Rouge consiste en un retour à l’ordre fondamental, un ordre pré-cosmique, un rappel lancinant des lois du Chaos où le spectateur peut apporter sa part, une part tellurique, car en se faisant chambre d’écho de tout ce qui peut se passer dans les profondeurs du monde joué face à lui, il peut s’y plonger totalement.
Marteau Rouge nous offre la vision d’un macrocosme flottant, sans colonne vertébrale apparente, où évolueraient des entités séparées, des sortes de singularités irréductibles les unes aux autres, trois univers qui séparément et simultanément, selon la loi du développement inégal et combiné, cohabiteraient pour le plus grand bonheur souffrant de spectateur, trois mondes qui se donnent en même temps.


Jean-Claude Vuarchère
(peintre)